×

Croyances et réligion chez les Sénoufo

Les morts ou « koubélé » occupe une place importante chez les Sénoufo. De façon générale, pour la plupart, les morts ne sont pas morts, mais ils sont embarqués sur le chemin du voyage et continuent d’exister sous des formes de forces surnaturelles complexes.

Ils sont en contact avec les vivants, mais de façon imperceptible. Quoiqu’invisibles, ils ne sont pas coupés de notre univers. Ils y habitent d’une manière permanente, communiquent avec nous par le truchement des songes et des visions et à travers la voix des devins. Ils peuvent sauver ou perdre n’importe qui d’entre nous, car leur joie et leur colère sont à la dimension de leur puissance spirituelle.

Pour le Sénoufo, la famille n’est pas faite que de vivants, ceux-ci sont en réalité la partie la moins importante. Son origine, ses fondements, sa force et son âme résident dans l’ensemble des morts. Ainsi, les vivants dans leurs préoccupations restent convaincus que les morts les observent. Voilà pourquoi lorsqu’il y a un décès, les vivants doivent respecter et exécuter avec rigueur les volontés du disparu. Ces volontés sont connues en consultant régulièrement les devins. La violation de ses prescriptions suscite une réaction des ancêtres. Celle-ci pouvant être immédiate, peut revêtir diverses formes : intempéries, sécheresse, inondations, mort de bétail, maladie, décès… Les funérailles revêtent deux aspects, l’inhumation, puis les funérailles proprement dites « kouffor ».

Funérailles en pays Sénoufo

Quand un membre décède, le chef de famille endeuillé en informe le sizanfolo (chef du bois sacré). Immédiatement celui-ci fait taper un tambour spécial dans l’enceinte sacrée pour annoncer le malheur. Les initiés en entendant cette annonce, abandonnent toutes leurs occupations et accourent dans les sinzang (bois sacré). Après l’annonce, le chef de famille endeuillé dépêche des émissaires dans tous les villages où il a des amis et des connaissances, pour porter la mauvaise nouvelle avec des précisions sur la date de l’inhumation. En fonction des relations avec le défunt, les Tcholobélé (membres du Tchologo ou Poro) de certains villages se mettent en route aussitôt que les instructions sont données par leur supérieur, pour participer à l’inhumation. Le nombre de participants aux cérémonies liturgiques de l’inhumation peut varier de 40 à 60 Tcholobélé, voir même plus, suivant l’importance sociale du défunt et l’étendu de ses relations. L’inhumation peut intervenir deux à trois jours après le décès. Durant tout ce temps, les Tcholobélé jouent de leurs instruments nuit et jour sur la place publique du village du défunt et dans sa concession. Les cérémonies d’inhumation commencent par la présentation publique des dons apportés par les parents et amis. Ces dons, sont surtout constitués de pagnes que l’on déplie pendant des heures, dans toute leur longueur avant de citer les noms des donateurs.

Pour clore cette première cérémonie, les pagnes provenant de la garde-robe du patrimoine du défunt même sont présentés, toujours publiquement. Ensuite, les Tcholobélé entrent en action : ils ramassent les pagnes entassés, les transportent sur la place où le corps du défunt est enveloppé. À ce moment précis, les non initiés se retirent. Sous l’œil vigilant des anciens initiés, les Tcholobélé exécutent, à l’aide de leurs divers instruments de musique et en compagnie de leurs camarades masqués, des rites bien précis en conformité avec l’âge et le sexe du défunt. Une fois cette cérémonie capitale achevée, les masques se retirent dans le sinzang, les femmes et les non-initiés sortent de leurs cachettes, la musique profane réoccupe les lieux. Le corps est alors placé sur une sorte de brancard constitué de trois pièces de bois. Deux tcholobélé le portent et penchent simultanément à droite puis à gauche trois fois, ce qui signifie que le défunt demande aux vivants l’autorisation de les quitter pour l’au-delà. Ensuite, ils prennent la direction du cimetière, suivis de toute l’assistance. Pour manifester son attachement au disparu, le chef de famille doit organiser en son honneur, quand il s’en juge capable matériellement, les funérailles appelées kouffor.

Le Kouffor

Ces cérémonies peuvent avoir lieu une ou plusieurs années après l’inhumation du défunt. Elles se mettent en place toujours en saison sèche, après les récoltes. Le chef de famille prend l’initiative de leur organisation en l’honneur du disparu. Il fixe donc la date et en informe les parents et les amis éloignés. Le jour venu, le village en général, et la concession du chef de famille en particulier, s’animent d’une foule de gens. Les Tcholobélé se retrouvent dans le Tcholokaha avec les instruments rituels. Pendant deux ou trois jours, tous les musiciens invités (ceux qui entretiennent des relations de parenté et de fraternité avec le village endeuillé) animent des danses jusqu’à l’aube, pendant que les Tcholobélé accomplissent des cérémonies rituelles sur la place publique. Au troisième jour le village se vide de ses étrangers mettant ainsi fin aux funérailles. Selon la conception métaphysique Sénoufo, après l’inhumation, le défunt n’accède pas immédiatement au royaume des ancêtres. Il est accueilli dans une antichambre où son séjour se prolonge jusqu’au déroulement des kouffor. Après ces dernières, les ancêtres acceptent de le recevoir dans leur royaume. Dès lors il est définitivement libéré du monde des vivants et intimement intégré à celui des morts d’où il pourra veiller sur les siens.

Les derniers articles

  • Les Ehotilé ou Bétibé

    A travers les Sous-Préfectures d'Adiaké (Adiaké, Assomlan, Eplemlan, Etuessika, N'Galiwa, Mélékoukro, Adiaké-Kakoukro...) et d'Etuéboué (Abiaty,…

  • Le mariage Malinké

    Le mariage reste un événement central dans la reproduction des structures familiales en pays Malinké.…

  • Les Niaboua ou Nyabwa

    Des révélations de M. Alfred Schwartz (cet européen anciennement au Centre ORSTOM-Sciences humaines de Petit-Bassam),…